mardi 10 mai 2016

Des traces de toi



Les graviers crissent sous tes pneus
tu t’en vas
déjà
et j’ignore
encore
ce que tu m’as laissé.
L’amertume s'insinue, te remplace, enroule ses bras autour de moi, et m’étreint.
Je sais déjà que ce n’est pas ça dont j’ai envie, besoin.
Là où je n’avais vu que le soleil sur ta peau et la mienne, je perçois à présent le vent frais, je découvre les détritus abandonnés, c’est toi qui avais raison : cet endroit est sordide.
Et je fume,
une,
deux, peut-être trois cigarettes, jusqu’à ce que le vent emporte enfin ton dernier mot : « détestable ».
Quand je reprends le volant, mes doigts s’étonnent de sa dureté, après la souplesse de ton ventre, que j’ai gardée.
Je rentre au ralenti, moi qui étais tellement pressée
d’arriver
que je t’avais précédé.
À mesure que l’amer de ton départ se dilue,
je réalise,
surprise,
que ton sourire flotte encore. Ton regard continue de me réchauffer.
Et plus tard, bien plus tard, quand je me déshabille enfin pour me laver de toi, à mon corps défendant, je sens, en passant les mains sur mes hanches,
que c’est ta paume qui est restée,
comme incrustée,
et que j’ai gardée.
Aussi.
Longtemps après que tes mots se sont envolés, le timbre de ta voix me reste, encore.
Je sépare doucement les perles que je vais garder – ton sourire, tes yeux, ta peau moite, ton odeur, ton rire, tes mots chauds – des graviers que je voudrais laisser sur ce parking sale. Ils s’accrochent malgré moi à mes roues.
Tant pis, j’aurais dû le savoir.
Je m’en détacherai. Plus tard.